La vie, une projection en différée?Préambule

La vie, une projection en différée? – Préambule

« Tes yeux me voyaient quand je n’étais qu’une substance informe, et dans ton livre mes membres étaient tous écrits; de jour en jour ils se formaient, lorsqu’il n’y en avait encore aucun. » Ps 139,16

Devrions-nous interpréter ce passage comme une simple présentation d’une imagerie échographique ou alors serait-ce un script d’une séquence narrative révélant un développement et un enchaînement cohérent d’événements donnés? Je me permets d’ouvrir avec cette sorte de mise en abyme en partant de ce psaume afin de pouvoir initier un questionnement plus général.

De prime abord, notre vie sur terre s’apparente à un scénario, à une intrigue où se joue l’histoire de l’humanité depuis la nuit des temps. En effet, certains événements se chevauchent, d’autres se succèdent et deviennent par ricochet l’élément déclencheur d’un nouvel événement; puis, l’apogée ou le déclin de cet autre événement dépendra de l’action ou de l’inaction des uns et des autres. 

Dans ce synopsis divin, chacun d’entre nous y est présenté comme l’acteur principal sur le chemin de sa destinée, capable de répandre tant de l’espoir que de la désolation par les gestes que nous choisissons de poser ou de ne pas poser.

À cet égard, une belle illustration serait le regard que pose le psalmiste, en différé, sur l’histoire de Joseph vendu comme esclave par ses frères (Ps 105,7-45).

Déjà, nous nous rendons très vite compte en lisant le récit originel dans la Genèse que tous les gestes, les paroles et les comportements de Joseph face à son entourage (certains jugeant son comportement d’orgueilleux et d’immature), n’ont fait que concourir à le mener inévitablement vers la fosse.

Plus tard encore, le scénario ne semble toujours pas avoir changé malgré l’attitude cette fois-ci vraisemblablement irréprochable de Joseph : il refuse de céder aux instances de la femme de Pothifar, démontrant ainsi de la crainte à l’égard de son Dieu et de la loyauté envers son maître; malgré cela, il se fait jeter en prison. Ensuite, en prison, il donne généreusement l’interprétation d’un songe à un sommelier du pharaon, lui prédit qu’il sera libéré et restauré dans ses fonctions et lui demande en échange de ne pas l’oublier une fois sorti de la geôle; mais celui-ci, dès sa libération, l’oublie!

Puis, contre toute attente, à un moment donné, comme par magie, Deus Ex Machina, quelque chose se produit : Pharaon fait un rêve! Et ce sera ce fameux rêve qui sera l’élément déclencheur de la glorieuse destinée de Joseph et par ricochet la voie de salut de tout Israël.

De surcroît, j’aime la manière dont le psalmiste ouvre cette intrigue avec une annonce magistrale, nous donnant subtilement du même coup un indice clé : « jusqu’au temps où arriva ce qu’il avait annoncé » (Ps 105,19a).

Par la suite, dans le verset 20, le psalmiste se laisse aller dans une magnifique métaphore filée où il feint confondre le souverain égyptien avec YHWH. Incontestablement, c’est Dieu qui tire les ficelles dans tout ça! Il est le maître des temps et des circonstances; Il renverse et il établit les rois.

Le fin mot de l’histoire: N’est-ce pas que nous avons tous, à un moment donné de notre vie, connu des saisons où peu importe notre volonté, nos bonnes actions, notre zèle, notre acharnement à vouloir faire fonctionner les choses, et malgré même nos instances dans la prière, certaines situations demeuraient inchangées, voire même empiraient? N’est-ce pas que, subitement, à un moment des plus improbables, comme par magie dirait-on, ce ciel d’airain se transformait tout à coup en un ciel bleu et limpide, faisant alors place à un changement radical de notre situation du jour au lendemain?

Comment donc interpréter cet état des choses?

Je crois que nous sommes tous dotés du libre choix et sommes responsables de nos actions et décisions, en autant que celles-ci s’inscrivent dans les paramètres imposés par un script voulant une cohésion universelle et globale de l’histoire de l’humanité; histoires dont la synchronicité nous dépasse parfois en tant que microcosme.

Par Thérèse Kanyange

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